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16 octobre 2016

Oscar Lalo, Les contes défaits, Belfont, août 2016. RL 2016. 217 pages.

les contes défaits

Oscar Lalo, Les contes défaits, Belfont, août 2016. RL 2016.  217 pages.

Un choc auquel je ne m’attendais pas, ce livre ! Une bonne surprise, en ce sens, bien qu’éprouvante.

Je m’intéresse aux réécritures, réinventions, revisites des contes. Et avec ce titre, je pensais avoir trouvé ce qu’il me fallait. Les premières lignes de la quatrième de couverture semblaient aller dans ce sens. « Peau d’âme, noire neige, le petit poussé…Il était zéro fois… c’est ainsi que commencent les contes défaits ».

Pour comprendre ce livre, il faut comprendre que les contes font, forgent la personnalité des enfants. Mais quand l’enfance est brisée, les contes n’y peuvent plus grand-chose, et il ne reste que la page blanche pour se (re)construire.

Le livre est constitué de multiples petits chapitres, et les 46 premiers sont constitués d’un récit de vacances. A chaque vacance, le narrateur, son frère ainé, puis sa sœur sont envoyés systématiquement en colonie de vacances. Non, que dis-je, en home d’enfant. C’est cher, bien organisé, avec un beau prospectus montrant le petit déjeuner des enfants constitué de jus d’orange et de croissant. Qu’ils ne verront jamais. Comment se dédouaner en mettant le prix. Mais « Comment dire à sa propre mère qu’elle nous fait mal quand elle nous dit que c’est bien ? Comment dire à son père qu’il faut nous écouter ? Comment dire à notre famille que le linge sale ne se lave qu’en famille ? Et que les piles de linge propre repassé par ordre alphabétique cachent autant de tâches qui ne partiront jamais ? » Car dans cette colonie de vacances, l’enfance de certains enfants se brise, parfois.

Chapitre 47. Un homme reconstruit son passé comme un puzzle, auquel il manque toujours une pièce. Il a soixante cinq ans. Il entend un cri. Le cri vient du puzzle. De la pièce manquante. Alors il tient son journal. « Un journal, c’est moins cher qu’un psy. Sauf qu’il faut trier les morceaux tout seul. Pas toujours évident. J’irai chez le psy plus tard. J’irai consulter qu’en j’en arriverai à dégueuler mon âme. » Que s’est-il passé lors de son premier séjour dans cette colonie, qu’il a occulté toute sa vie ? Il lui faut cracher le morceau de puzzle et remonter la piste, comme une enquête, douloureuse à vivre pour lui, et à lire, pour nous.

Dès les premiers petits paragraphes, je me suis rendue compte que nous n’étions pas dans la relecture des contes classiques de notre enfance. Loin de là. Et dès les premières lignes, l’écriture et le récit font ressortir une tension chez le personnage qui se répercute à son lecture. J’ai lu ce livre en étant oppressée, en redoutant la suite, en comprenant au fur et à mesure tout ce qui n’était pas dit.

Alors, comme je l’écrivais dans mon deuxième paragraphe, les fondations de l’enfance ont été brisées, la page est blanche, il lui a fallut se (re)construire sur le néant de son enfance.

Un livre qui tient sa promesse, rompre la zone de confort du lecteur. C’est réussi !

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